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Irak: les janissaires de l'Amérique

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fournir de l'armement à 80 000 irakiens à 82% sunnites dans un pays à majorité Chiites. Les USA semblent jouer avec le feu une fois de plus - comme quand ils ont armés les Talibans en Afghanistan à partir de l'invasion russe de 80 et ont vus le resultat 20 ans plus tard.

Irak: les janissaires de l'Amérique

Cinq ans après l'invasion, les Américains ont engagé un formidable pari tactique en Irak. Ennemis d'hier, 80000 sunnites, anciens «terroristes», ex-saddamistes et guerriers tribaux sont désormais salariés des Etats-Unis. Amis ou «chevaux de Troie» de la rébellion? A Bagdad, le débat fait rage.

Patrice Claude, envoyé spécial à Bagdad, Le Monde
Lundi 17 mars 2008

C'est un jeune officier aux yeux clairs qui termine son troisième séjour en Irak. Face au Français qui l'apostrophe dans le lobby de l'Al-Rachid, dernier «palace» à peu près en état de marche au cœur de la fameuse «zone verte» ultra-fortifiée de Bagdad, Dexter F. a une hésitation. «Sorry frenchie, je n'ai pas le droit de vous parler nommément, vous le savez bien.» On sait. Depuis un an environ, les autorités irakiennes font la même chose et interdisent à leurs policiers, soldats et même aux médecins de s'exprimer dans la presse. Notamment sur les attentats, les attaques, le nombre des victimes. Heureusement, tout le monde n'obéit pas...

Para de la 82e unité aéroportée, le soldat américain a fini par se laisser tomber sur la banquette de cuir noir. On l'avait rencontré début 2007 dans un Pizza Hut de Camp Victory, l'immense base logistique d'environ 60000 hommes et femmes que l'US Army a édifiée comme une ville de banlieue texane près de l'aéroport international de Bagdad. A l'époque, Dexter entamait un troisième séjour irakien qui allait durer quinze mois. Il était hors de lui.

«Franchement, lâche-t-il à la première question, heureusement qu'on s'en va, je n'en peux plus. Voilà maintenant qu'on nous oblige à siroter le thé avec des types qui nous tiraient dessus il n'y a pas six mois. Et qui nous tirent encore peut-être à la nuit tombée, on n'en sait rien. Des types qui ont parfois tué les nôtres, qui ont torturé, mutilé ou décapité des civils. C'est dégueulasse...» Tout Bagdad ne parle plus que de ces «types», les sahwas, les «Fils d'Irak», les «comités populaires d'autodéfense» ou encore les «citoyens locaux concernés», comme les a curieusement baptisés l'ambassade américaine.

Peu importe l'appellation, ce sont bien les mêmes hommes, les mêmes groupes, tous avec la même paye et la même mission, qui sont recrutés depuis un an environ pour aider, moyennant 10 dollars par jour, à établir dans leurs quartiers, dans leurs villes ou leurs tribus, la pax americana en Irak. Payer l'ennemi pour qu'il cesse ses attaques. Salarier les bad guys, les «bandits», les «rebelles», les «insurgés», les «terroristes» pour qu'ils changent de camp, qu'ils deviennent les yeux et les oreilles de l'armée, qu'ils cessent, à tout le moins, de tirer sur les boys ou de placer des engins explosifs sous leurs pieds.

L'idée, qui, comme dit le général David L. Petraeus, commandant en chef du corps expéditionnaire, «a largement contribué» à la baisse de 60% à 70% des attaques et des attentats depuis huit mois, était tellement simple que certains, dans les chancelleries, se demandent pourquoi il a fallu près de 4000 soldats tués, 29000 blessés et, selon l'OMS, au moins 150000 victimes irakiennes, pour en arriver là.

La première raison est simple: les stratèges de Washington ne l'avaient pas envisagée. C'est un petit clan tribal sunnite de l'immense province sunnite d'Al-Anbar, qui fut longtemps «la» place forte des djihadistes anti-occidentaux, qui approcha le premier, fin 2006, les commandants américains du cru. Le père et trois des frères du cheikh Abdoul Sattar Abou Richa, petit chef local qui, jusque-là, ne s'intéressait guère, dit-on, qu'à la meilleure manière de détrousser les véhicules qui traversaient «son» territoire tribal, avaient été égorgés par des fidèles d'Al-Qaida en Irak.

Pourquoi? Refus de coopérer sans doute. On ne saura jamais combien de milliers de civils irakiens, notamment chiites, ont été massacrés dans des centaines d'attentats aveugles, y compris des dizaines de «résistants» opposés à l'occupation mais jugés par trop «mécréants», par les obscurantistes patentés du djihad. Du côté de Diyala et de Mossoul, où ils sont engagés depuis huit semaines dans «une offensive de longue haleine» contre «les dernières concentrations terroristes», les soldats américains et irakiens découvrent plus d'un charnier par semaine. Vingt, trente, quarante cadavres à chaque fois, presque toujours avec les mains liées dans le dos, une balle dans la nuque et parfois des traces d'horribles tortures sur le corps.

C'est, entre autres, à cause de ces tueries que le phénomène du Réveil (Sahwa en arabe) a commencé. Assaillis par leurs ouailles qui n'en pouvaient plus du rigorisme moyenâgeux que les fanatiques salafistes imposaient dans leurs villages ou leurs quartiers à Bagdad, Fallouja, Ramadi ou Bakouba, des dizaines de cheikhs tribaux, souvent plus importants qu'Abou Richa, qui sera assassiné en septembre, dix jours après avoir imprudemment serré la main du président Bush face aux télévisions, ont fini par imiter l'exemple et offert leurs services à l'Amérique.

La deuxième raison du retard avec lequel le haut commandement américain a engagé le plus formidable et le plus dangereux pari tactique du conflit irakien, c'est un lieutenant-colonel d'infanterie, anonyme lui aussi parce que, selon la formule consacrée, il «n'est pas autorisé à parler à la presse», qui l'explique: «Nous nous sommes aveuglés tout seuls. Nous avons cru en notre propre propagande qui faisait de tous ceux qui nous attaquaient soit des baassistes acharnés, soit des fanatiques islamistes aux ordres d'Al-Qaida.»

A la veille de son départ définitif d'Irak, le général Raymond Odierno, numéro deux du corps expéditionnaire, ne disait pas autre chose: après avoir admis que l'Amérique avait commis des erreurs «en 2003 et 2004, avec le démantèlement de l'armée irakienne, l'éviction des baassistes de l'administration, etc.», il affirmait, en février à Newsweek, avoir tardivement «réalisé que beaucoup de ces gens qui nous combattaient n'étaient pas vraiment des insurgés. Ils n'étaient pas vraiment idéologiquement opposés au progrès. [...] Ils essayaient juste de survivre.»

En janvier 2007, les «citoyens locaux concernés» étaient moins de 1500 quand le président Bush, jouant son va-tout, décida d'envoyer, à partir de juin et pour un an, 30000 soldats supplémentaires pour renforcer un corps expéditionnaire alors estimé à 135000 hommes. «Nos élus réclamaient des résultats rapides - et visibles - sur le terrain, se souvient Dexter. Il fallait changer de tactique.»

L'idée, développée alors par George Bush, était d'ouvrir «une fenêtre d'opportunité» au gouvernement du chiite Nouri al-Maliki afin qu'il prenne rapidement toutes les mesures législatives et pratiques à une «nécessaire réconciliation nationale» entre les communautés du cru. Pour l'essentiel, l'Amérique attend toujours. Mais le fameux surge, le sursaut, l'effort dont le succès ou l'insuccès occupe les débats politiques en cours dans la campagne des primaires américaines, a incontestablement fonctionné parce que le général Petraeus a su profiter de deux développements assez inattendus: la suspension, depuis août 2007, des activités armées des 60000 miliciens de l'Armée du Mahdi créée par le prêcheur chiite radical Moqtada al-Sadr, et la surprenante montée en puissance du phénomène sahwa.

Aujourd'hui, les supplétifs sont autour de 80000, de confession sunnite à 82%, et «anciens terroristes pour au moins la moitié d'entre eux», glisse un officier supérieur chiite. Le général Petraeus résuma sa motivation dans Time, le 11 février: «On ne peut pas tuer toute une insurrection, on ne peut pas vaincre tout le monde. Il faut les retourner.» En apparence, c'est fait. La seule question qui angoisse la région est de savoir pour combien de temps...

Répartis dans près de 150 milices supplétives, «les Fils d'Irak» sont essentiellement basés dans la moitié nord du pays. Sauf au Kurdistan, où les pouvoirs autonomes n'en veulent sous aucun prétexte et vitupèrent contre celles qui ont été créées autour de leur région, dans les environs de Mossoul et Kirkouk. Les Kurdes ne sont pas les seuls à se méfier du phénomène. «Subrepticement, s'alarme un ministre adjoint chiite qui dirige une grande administration à Bagdad, c'est une nouvelle armée, un gros cheval de Troie, une milice plus puissante et plus dangereuse que toutes celles qui existent déjà que les Américains ont créée. Que veut Washington au fond? Répéter les erreurs commises en Afghanistan? Multiplier les «seigneurs de guerre» qu'il sera impossible de désarmer? Préparer la prochaine guerre civile peut-être? Remettre la minorité sunnite au pouvoir pour faire pièce à l'Iran et satisfaire ses alliés sunnites du Golfe, les Saoudiens, les Jordaniens, les Egyptiens?»

Alaa Abou Ahmed, un grand costaud presque imberbe, âgé «d'environ 30 ans», mécanicien de son état et membre salarié de la milice créée l'an dernier dans le «chaud» district d'Al-Dora, dans le sud de la capitale, nous explique comment le «réveil» a sonné pour lui. Il avoue d'abord sans complexe avoir «participé» au nettoyage ethnique des chiites qui habitaient naguère son quartier. «Oui, j'en ai tué certains», reconnaît-il d'un pâle sourire en coin. «Des salauds de toute façon. [...] Mon frère habite maintenant une petite maison qui appartenait à un tueur de Jaish-al-Madi», la milice d'Al-Sadr, accusée par de nombreux sunnites chassés des anciens quartiers mixtes de la capitale d'avoir été le fer de lance du carnage interconfessionnel en 2006 et une grande partie de 2007.

En avril 2007, reprend Abou Ahmed, «notre cheikh nous a réunis à la mosquée. On était une cinquantaine. Il a dit que les gens d'Al-Dora, les honnêtes commerçants, les derniers médecins, les instituteurs disaient qu'ils en avaient assez des combats et des raids des apostats» (dans le langage codé en vigueur depuis le début de la guerre civile, les «apostats», pour les activistes sunnites, sont les chiites, et les takfiris, «ex-communicateurs», pour leurs homologues chiites, ce sont les sunnites). «Il a dit qu'un officier infidèle avait proposé d'arrêter les combats, de mettre des murs anti-bombes autour de nos quartiers, de nous laisser protéger nous-mêmes nos rues et nos maisons. Il a dit que les «Amrikis» proposaient de nous organiser, de fournir des armes et des véhicules en cas de besoin. Et même de nous donner un salaire de 14000 dinars par jour (environ 10 dollars)! Certains d'entre nous ont crié à la trahison. Les autres ont accepté.»

Comme beaucoup de ceux passés à la coopération avec «l'envahisseur», le chef du groupe d'Alaa, un certain Saleh Kashgul Saleh, était colonel dans les services de sécurité intérieure - les «moukhabarates» de triste mémoire - de Saddam Hussein. «Qu'avions-nous à perdre?, poursuit notre interlocuteur. La plupart d'entre nous ont accepté que les infidèles prennent leur photo et leurs empreintes pour entrer leur identité dans leurs ordinateurs en échange du badge qui nous permet de sortir armés. Pas moi. Quand je sors, j'emprunte celui d'un de mes cousins. Je préfère rester anonyme. Un jour, les «Amrikis» partiront.»

Les listes peuvent tomber entre les mains des moudjahidin. Ou bien dans celles des «Iraniens» qui nous gouvernent et dont il faudra bien qu'on s'occupe, plus tard...

Depuis octobre, au moins 200miliciens des «comités sahwas», dont plusieurs dizaines de cheikhs claniques, ont été assassinés, parfois sur ordre d'Al-Qaida, souvent par des membres de leur propre petite armée ou de leur tribu. Pour certains, c'est une nouvelle guerre civile, intrasunnite désormais, qui démarre en Irak. «Les sahwas sont presque tous infiltrés ou complices des rebelles», répètent inlassablement les officiers irakiens de l'armée et de la police, qui sont presque tous chiites et qui se méfient des «Fils d'Irak» comme de la peste.

Les militaires américains admettent qu'il «peut y avoir des traîtres» au sein de leurs nouveaux groupes de supplétifs. Plusieurs dizaines d'entre eux ont dû être arrêtés pour des exactions contre les civils, ou «meurtres extrajudiciaires». Sur le terrain, beaucoup, comme Dexter, ne «tournent jamais le dos» aux nouveaux alliés. Mais les officiers insistent: «Notre processus de sélection est bon», affirme le contre-amiral Greg Smith, porte-parole de l'US Army.

Une chose est sûre, le processus qui avait consisté, dès avril 2003, à liquider l'armée et tous les services de sécurité nationale, de même qu'à interdire tout emploi public aux adhérents du parti Baas, est bel et bien renversé. A Adhamiyeh, un des derniers bastions sunnites de Bagdad, le nouvel homme fort était un ancien officier de police, le colonel Riyad al-Samarraï. Tué le 7 janvier dans un attentat-suicide, il a été immédiatement remplacé par un solide gaillard en veste de cuir, naguère officier bassiste lui aussi, nommé Farouk Abdou Sattar al-Obeidi.

A la satisfaction des généraux de l'US Army, l'«œuvre» du «martyr héroïque», comme disent les affiches de deuil collées sur les murs décrépits et troués de balles du quartier, se poursuit. Les centaines de miliciens qu'il avait recrutés pour «défendre» le lieu continuent le «travail». On peut les voir à toute heure du jour et de la nuit, certains en civil avec keffieh rouge et blanc sur le chef, d'autres tête nue, en vareuse vaguement kaki, kalachnikov au poing, dresser des barrages autour des voies et des lieux stratégiques, fouiller les véhicules et les passants, vérifier les papiers de tous ceux qui entrent ou sortent du quartier.

A Fazl, autre quartier central de la capitale, Adel al-Mashadani, ancien officier de la Garde républicaine spéciale de l'ancien dictateur, est désormais «le Lion de Bagdad». Au service des Américains. Que les murs de ses rues soient couverts de graffitis à la gloire du «grand martyr Saddam» ou réclament «la mort pour Maliki!», le premier ministre chiite du pays, importe peu. Le «Lion» contrôle plusieurs centaines d'hommes en armes et il affirme à qui veut l'entendre que «jamais la police ou l'armée des «Perses» qui contrôlent l'Irak n'entrera» dans «sa» zone.

A Amriya, c'est un certain Abou Ahmed, ancien capitaine de l'armée baassiste et ancien chef d'une unité de l'Armée islamique en Irak, une des organisations majeures de la «résistance», qui dirige le «Réveil» local. Dans la partie ouest du Grand Bagdad, qui inclut notamment la localité d'Abou Ghraib, Abou Marouf, naguère «émir» local d'un groupe de la résistance nationaliste dénommé Brigades de la révolution de 1920, contrôle aujourd'hui la zone avec 13000 «salariés contractuels».

Ramadi, Bakouba, Diyala, c'est à peu près partout la même chose désormais. Et les frictions qui tournent parfois à l'affrontement armé avec la police ou l'armée irakiennes se multiplient. La majorité chiite qui domine le gouvernement depuis les élections de 2005 reste rétive à la volte-face américaine. Depuis un an que le général Petraeus réclame l'intégration d'au moins un quart de ses auxiliaires sunnites dans l'armée et la police, moins de 12000 d'entre eux seraient «en passe» d'y être acceptés.

Initialement très critiques du phénomène, le premier ministre Maliki et son principal allié politique, Abdel Aziz al-Hakim, chef du premier parti chiite de l'Assemblée, ont tempéré leur position et saluent désormais, en public, «le sursaut patriotique des frères sunnites» qui a permis de diminuer l'intensité des carnages. Ce qu'ils en pensent vraiment transparaît de leurs décisions.

Pas question par exemple d'accorder aux Américains - qui veulent aller jusqu'à 100000 supplétifs - tout ce qu'ils demandent pour leurs «nouveaux amis». Pas de quartier général du «Réveil» à Bagdad, pas d'armements lourds, pas de véhicules blindés. Même le rétablissement des services publics - eau courante, électricité, reconstruction des écoles, transports, ramassages des ordures, etc. - promis par l'US Army à ses supplétifs dans les zones tribales, les villages et les quartiers urbains tarde à être mis en œuvre. «La mauvaise volonté et la corruption du gouvernement sont patentes», nous disait un des «pères» autoproclamés du phénomène, le cheikh Ali Hatem al-Ali Suleiman, «prince» de la grande tribu des Douleym.

Le développement des sahwas a montré son efficacité sur le terrain. Dans la province d'Al-Anbar, les attaques antiaméricaines ont diminué de 90%. Les généraux s'interdisent pourtant de crier victoire et le contre-amiral Greg Smith ne cesse de mettre en garde «contre tout triomphalisme intempestif».

Le général Petraeus et ses adjoints tiennent le même langage et réclament d'ailleurs qu'une fois la majorité des 30000 renforts du surge rentrés chez eux - d'ici à juillet en principe - son contingent soit maintenu à «au moins» 135000 hommes pour «toute l'année 2008, et sans doute plus longtemps». A Bagdad, chacun ou presque en est persuadé, quelle que soit l'identité de celui ou celle qui occupera la Maison-Blanche l'an prochain, les Américains ne sont pas prêts au départ.

Où en sera alors le phénomène sahwa? Mystère. «Toute l'entreprise est un pari, lâche Labid Abbawi, sous-secrétaire d'Etat aux Affaires étrangères, un formidable pari sur l'avenir de l'Irak.» Qu'ils aient changé de cheval pour des raisons mercantiles - outre les salaires des supplétifs, des «dons» de dizaines de milliers de dollars sont discrètement distribués aux cheikhs des tribus pacifiées - par refus du fanatisme, par sursaut patriotique, ou simple tactique en attendant des jours meilleurs, les Fils d'Irak veulent à présent jouer un rôle politique.

Un «Parti du Réveil» est en cours de création. Certains réclament déjà des postes ministériels. La chance de la majorité chiite, pour l'instant, est que la nouvelle armée supplétive n'obéit pas à un chef mais à 100, à 1000. Elle est désunie, fractionnée, divisée. «Grâce à Dieu...», se rassure-t-on dans la «zone verte».


17/03/2008
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