Comment éviter les ratés du « rating »
COMMENTAIRES
ceci est la nieme illustration d'un principe simple: les evaluations sont faites en fonction de l'interet de celui qui la finance - parfois neutre, jamais contre.Ici, les agences des notations qui ont une influence ENORME sur les marchés en notant la solvabilité des sociétés et des états, sont payées par les sociétés qu'ils jugent !!!!
Donc, comme une mauvaise note, donne des taux d'interêts plus élevés, les agences surnotent les sociétés qu'elles sont supposées évaluer en toute objectivité, pour ne pas facher les clients qui sont ces memes sociétés.
C'est la meme chose quand les agents immobiliers disent que le marché de l'immobilier ne baissera pas - pas besoin d'avoir un expert avec soit pour savoir que cet avis est forcement biaisé.
C'est la meme chose pour les laboratoires d'evaluation qui notent les qualités des produits pour les pubs, ou les risques divers et variés (comme les risques electromagnetiques, chimiques ou autres).
Monsanto avait fait de meme en arrêtant un test qui commencait à montrer des risques. Soit les resultats sont bons, soit ils ne sont pas publiés.
De même, quand les universités sont financées par des groupes d'interêts economique elles ne vont jamais aller contre leurs bailleurs de fond - sinon les labos ferment.
Les médias sont dans la chaine d'information et sont plus rentables si elles rentrent dans le jeu que si elles ne le font pas (il est gratuit de gober les informations qui sont données, il est nettement plus cher de chercher les vraies informations).
Que restent-il quand les questions sont complexes ?
- un certain bon sens, ne pas croire la réponse quand celui qui vous la donne a intérêt à vous la donner;
- vérifier l'independance de la source : qui le paye, et qui paye celui qui le paye ?
- suivre ce que font les plus informés (par exemple, les grandes fortunes ont vendus plus de la moitié de leurs actifs immobiliers en 2007 - avant la chute)
- ne pas suivre les infos pour les masses (TF1, et TV en général), mais ce qui est plus pointu et pas relayé (le FMI a annoncé en mars 2006 que l'immobilier était trop haut et allait subir une correction
Comment éviter les ratés du « rating »
http://www.lesechos.fr/journal20080627/lec1_idees/4746284.htmLa sortie d'une crise passe souvent par une immolation. Dans la Bible, c'est une pauvre bête à cornes qui était chargée de l'expiation des péchés des hommes : « Le bouc emportera sur lui toutes leurs fautes dans une terre désolée ; il sera chassé dans le désert... » Dans la finance moderne, c'est souvent un acteur, si possible coupable. Après le krach de 1929, ce furent les grandes banques, condamnées à éclater pour séparer leurs activités commerciales et d'investissement. Après la faillite d'Enron, ce furent les commissaires aux comptes, avec la disparition brutale d'Arthur Andersen, un des « big five », qui employait près de 100.000 personnes dans le monde. Mais, pour l'instant, aucun bouc émissaire n'a porté sur ses épaules le poids écrasant de la crise du « subprime », à l'exception de quelques PDG américains de banque, limogés sans ménagement mais non sans contreparties sonnantes et trébuchantes. Il y a pourtant un coupable idéal : les agences de notation - ou de « rating ». Faisant métier d'évaluer la capacité d'un emprunteur à rembourser en temps et en heure, elle n'ont apparemment rien vu venir, rien su empêcher.
Bien sûr, dans la crise du « subprime », longue est la chaîne des responsabilités, des courtiers américains accordant des prêts sans se soucier de la solvabilité des emprunteurs aux banquiers européens achetant des conduits sans avoir la moindre idée de leur contenu. Mais les agences de « rating » constituent une cible de choix. D'abord, elles sont des « usual suspects », à la fois peu nombreuses (trois grandes agences), très visibles et donc clairement identifiables. C'est facile de tirer sur Moody's, Standard & Poor's ou Fitch. Ensuite, leur modèle économique pose question. Elles sont payées par les entreprises qu'elles sont chargées de noter. On imagine les soupçons qui pèseraient dans les universités si les étudiants pouvaient choisir leurs examinateurs en leur payant directement la tâche qui consiste à leur attribuer des notes ! Enfin, les agences ont vraiment joué un rôle crucial dans l'enchaînement qui a débouché sur la crise.
Juste après l'épisode aigu du mois d'août dernier, où les banques ne se faisaient même plus confiance les unes aux autres, la notation était en ligne de mire. Mais les tourmentes qui ont suivi, de la chute de la banque anglaise Northern Rock à celle de sa consoeur new-yorkaise Bear Stearns, ont dévié le tir. Aujourd'hui, le débat repart des deux côtés de l'Atlantique, avec des déclarations très interventionnistes de la Commission européenne, de la SEC, l'autorité de tutelle des marchés boursiers américains, et peut-être bientôt du G8. Leur credo : il faut plus de réglementation.
Examinons les trois causes qui remettent en question les agences de rating. La première, le fait qu'il s'agit de cibles faciles, n'a bien sûr pas de pertinence au fond. La corpulence des ours ne justifie pas leur chasse. La deuxième, le modèle économique, est autrement plus légitime. Au sein des agences, il y a un risque évident de conflit d'intérêts entre vendeurs et noteurs. Face à ce risque, personne n'a pour l'instant trouvé la bonne réponse. Faire payer les investisseurs ? L'information serait inégalement répartie, ce qui favoriserait les coups tordus. Et si les emprunteurs ont intérêt à avoir les meilleures notes possibles pour abaisser les taux d'intérêt réclamés par les prêteurs, les prêteurs auraient intérêt aux mauvaises notes pour gagner plus. Faire réaliser la notation par une maison publique ? En France, c'est ainsi qu'on aurait fait. Mais avec deux risques majeurs : la corruption (ou la compromission, ou les réseaux amicaux) et l'incapacité de suivre le rythme infernal des mutations de la finance moderne. Une piste intéressante consiste à placer entre emprunteurs et noteurs une institution indépendante, qui encaisserait l'argent des premiers et choisirait les seconds sur appel d'offres.
Le troisième doute sur la notation est de loin le plus fort. Les agences de « rating » ont en effet été l'un des maillons qui ont permis la crise. Elles ont toutes donné leur meilleure note, le très convoité AAA, à des tranches de produits nouveaux, ces fameux crédits « structurés ». Le problème, c'est que ces CDO et autres animaux étranges à trois ou quatre lettres composés le plus souvent de centaines de prêts individuels agrégés n'ont rien à voir avec une obligation émise par une entreprise. Dans l'ancien temps, les agences de notation vantaient leur connaissance en profondeur des entreprises. Pour évaluer un constructeur automobile, leurs analystes passaient des heures à discuter avec les dirigeants et testaient leurs nouvelles voitures parfois deux ans avant leur commercialisation. Mais jamais un analyste d'une agence de notation n'a visité les bureaux d'un CDO. S'ils conduisent parfois des SUV (les 4 × 4 en version américaine), ils n'ont jamais piloté de SIV (l'un de ces nouveaux véhicules financiers). Les obligations classiques et les produits structurés n'ont pas les mêmes propriétés. Au final, les noteurs ont employé le même instrument pour mesurer deux réalités différentes. Comme si un ingénieur tentait de mesurer une distance avec un thermomètre ! Plus fort encore, ils sont peu à peu intervenus dans la fabrication des produits structurés, en conseillant les banques sur la meilleure façon d'obtenir le sésame AAA... qu'ils leur délivraient ensuite ! Les agences de notation devront faire le ménage dans leurs activités et créer de nouveaux instruments de mesure.
Mais, après tout, expliquent les dirigeants de Moody's, Fitch ou Standard & Poor's, la notation n'est qu'une information parmi les autres. Ils ont raison : les investisseurs ne doivent en aucun cas limiter leur appréciation à celle des agences. Mais... il y a la réglementation publique, en particulier aux Etats-Unis, et c'est une source du désastre. Car elle oblige les gérants de toute une série de produits financiers à investir une partie de leur capital en obligations ornées du fameux AAA. Cette obligation a créé une formidable incitation à « fabriquer » du papier AAA, même s'il n'avait pas la même solidité qu'un bon ou une obligation du Trésor américain. Les gérants pouvaient ainsi placer leur argent apparemment en toute sécurité, avec en prime des rendements plus élevés que celui des titres publics. Les agences de notation ont vu leur chiffre d'affaires bondir. En transformant leurs créances douteuses en titres AAA faciles à vendre, les banquiers avaient trouvé la pierre philosophale leur permettant de se débarrasser des risques qui les empoisonnaient depuis des siècles. Et les épargnants avaient la douce illusion de gagner de l'argent sans risque.
Cette transformation de l'information subjective qu'est le « rating » en une donnée objective va bien plus loin. Le « rating » est partout dans les modèles d'évaluation des risques des banques et donc les ratios prudentiels de Bâle II. C'est tout cet édifice qu'il va falloir revoir. La SEC envisage déjà, par exemple, la suppression des contraintes de « rating » pour les « money market funds », l'équivalent américain des sicav monétaires. Mais pour rénover le système jusqu'au bout il faudra des années.
Le petit monde de la notation ne sortira pas indemne de la crise financière. Les agences vont affronter une concurrence accrue, avec l'émergence de nouveaux acteurs comme par exemple la Coface, qui s'apprête à lancer son système. Mais il y aura une constante. Même si les agences se décident à inventer des instruments de mesure pour les nouveautés foisonnantes de la finance, même si les autorités mettent en place une réglementation plus adaptée, elles resteront sans doute des candidates de premier choix pour le rôle de bouc émissaire.
JEAN-MARC VITTORI est éditorialiste aux « Echos ». jmvittori@lesechos.fr
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