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En Suède, l'égalité salariale demeure une priorité

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Le même système économique ultra-libérale pousse la Suède vers la même dérive vers une inégalité des revenus.

Mais en Suède, à la fois la classe politique et les syndicats résistent avec un certain succès par rapport à chez nous - sans compter que les impôts et la redistribution sont bien supérieurs aux notres.

Le PDG le plus payé en Suède est à peine à la moyenne des 100 patrons Français les mieux payés. Il est à un niveau scandaleux, mais au moins, là-bas, la resistance est forte.

Un point commun avec la France sur la nature humaine et le patronat: les patrons veulent toujours - l'auto-limitation proposée par cette caste est une duperie.

En Suède, l'égalité salariale demeure une priorité

http://www.lemonde.fr/web/article/0,1-0@2-3234,36-855080@51-855167,0.html

Le principe de transparence, si cher aux Suédois, permet aux journaux locaux d'étaler régulièrement, grâce à la simple consultation des registres des impôts, les salaires des PDG. En 2005, Tom McKillop (AstraZeneca) a dominé la liste avec 31,3 millions de couronnes (3,45 millions d'euros) dont 17,4 millions (1,9 million d'euros) en bonus, loin devant Martin Henricson (Tradedoubler), Carl-Henric Svanberg (Ericsson) ou Hans-Holger Albrecht (MTG), qui avaient entre 2,2 et 2,4 millions d'euros de revenus. Pourtant, comparés à beaucoup de leurs collègues étrangers, les patrons suédois sont plutôt modestement payés bien que les entreprises qu'ils dirigent soient souvent des multinationales.

CHIFFRES

PATRONS.

En 2005, les rémunérations des PDG des entreprises suédoises cotées en Bourse ont augmenté de 16 %, contre 3 % pour l'ensemble des salariés du pays. Elles ont atteint en moyenne 2,8 millions de couronnes (309 000 euros).

FEMMES.

En moyenne, les femmes suédoises touchent aujourd'hui un salaire de 8 % à 18 % inférieur à celui des hommes selon les critères retenus.

A la mi-décembre, Michael Treschow, le patron des patrons suédois, a donc réclamé que les dirigeants suédois soient mieux payés, ce qui a provoqué une levée de boucliers des syndicats au moment où le pays entre en pleine phase de renouvellement des accords collectifs - qui fixent les niveaux de salaires - pour les deux tiers des employés du royaume. Certains patrons lui ont reproché de compliquer les négociations salariales en cours. Et la critique est allée jusqu'au ministre des finances et au premier ministre conservateurs qui ont appelé les dirigeants d'entreprise à plus de "retenue".

"Cela coûte beaucoup en Suède de payer un PDG cher, explique Stefan Fölster, économiste en chef de Svenskt Näringsliv, le patronat suédois. Cela vous coûte des exigences salariales bien plus lourdes de la part des syndicats qui sont puissants, et cela risque de vous attirer beaucoup d'articles négatifs. Car si les Suédois commencent à accepter que des gens comme Kamprad, le fondateur d'Ikea, ou des sportifs gagnent beaucoup d'argent, ils considèrent toujours les PDG comme des salariés beaucoup trop bien payés."

UN POUVOIR ÉCONOMIQUE CONCENTRÉ

Le principe d'égalité, tout aussi cher aux Suédois, fonctionne en effet à plein, surtout s'agissant d'égalité salariale entre hommes et femmes. Vendredi 12 janvier, Ylva Thörn, présidente de Kommunal, la grosse fédération des employés municipaux, a encore réclamé une rallonge supplémentaire pour les femmes afin de combler le retard.

Ces revendications sont récurrentes en Suède où les femmes sont entrées massivement sur le marché du travail dans les années 1970, ce qui avait entraîné un large développement des structures d'Etat-providence, crèches ou maisons de retraite. Depuis cette époque, le mouvement féministe suédois, très militant sur le plan politique aujourd'hui encore, a imposé ces questions en haut de l'agenda politique et syndical, en étant largement relayé par les médias.

La Suède a connu dans les années 1970 une période d'extrême lissage des salaires où la politique menée était très à gauche. C'était l'époque où Olof Palme, premier ministre réformateur qui souhaitait démocratiser le monde du travail, avait lancé les fonds salariaux de Rudolf Meidner, un économiste de LO, la confédération syndicale des travailleurs, très proche des sociaux-démocrates. Cet apôtre du plein-emploi voulait créer un système de formation d'un capital collectif qui facilite la politique salariale solidaire du mouvement syndical. Les ouvriers prendraient aussi le pouvoir sur le capital pour assurer les investissements et l'emploi dans le futur.

Mais la réaction du patronat avait été brutale et les fonds supprimés dès l'arrivée de la droite au pouvoir en 1976. Selon les simulations faites, ces fonds salariaux, s'ils avaient été maintenus, auraient détenu 43,5 % du capital des entreprises en 2005, et la majorité absolue aurait été obtenue dès 2012 avec 50,6 % des actions. Cet épisode a durablement marqué la Suède. Même si les syndicats sont en perte de vitesse depuis une dizaine d'années, ils représentent encore près de 80 % des salariés.

De longue date, la Suède a également été dominée par un petit nombre de gros acteurs économiques, à l'image de la famille Wallenberg, dynastie industrielle dont la cinquième génération règne sur la plupart des multinationales suédoises. Cette concentration du pouvoir économique a eu pour conséquence de limiter la concurrence entre dirigeants, maintenant ainsi leurs salaires à des niveaux plus modestes.

Même si ces salaires ont nettement augmenté au cours des quinze dernières années, depuis la vague de dérégulations du début des années 1990, le niveau demeure en retrait par rapport à de nombreux pays.

Olivier Truc



13/01/2007
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