La "légèreté" des policiers dénoncée dans le drame de Clichy-sous-Bois
La "légèreté" des policiers dénoncée dans le drame de Clichy-sous-Bois
http://www.lemonde.fr/web/article/0,1-0@2-3226,36-842860@51-842876,0.html
'inspection générale des services (IGS) a remis récemment au juge d'instruction Olivier Géron son rapport final d'enquête sur le drame de Clichy-sous-Bois (Seine-Saint-Denis), où deux adolescents, Bouna Traoré et Zyed Benna, avaient trouvé la mort le 27 octobre 2005 dans un transformateur EDF.
Dans ses conclusions, l'IGS établit qu'il y a bien eu une course-poursuite, et critique sévèrement le comportement, "d'une légèreté et d'une distraction surprenantes", de certains policiers. Elle ne se prononce pas, en revanche, sur la culpabilité éventuelle des cinq policiers entendus, le 13 novembre, comme témoins assistés, par le juge Olivier Géron.
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La course-poursuite.
L'IGS est formelle sur ce point. Leur enquête, fondée sur l'audition de
vingt policiers, mais aussi celle de quatre des jeunes suspectés, le 27
octobre 2005, par les policiers, d'avoir tenté de cambrioler un
chantier, établit que "les jeunes Bouna Traoré et Harouna Konte ont
été poursuivis, une première fois, à l'intérieur du chantier, par un
seul policier en civil, puis, qu'après avoir distancé leur poursuivant,
ils ont été poursuivis une seconde fois (…) alors qu'ils se trouvaient dans le parc Vincent-Auriol en compagnie de leurs six amis. (…) A chaque fois la poursuite fut brève, à la fois dans le temps et dans l'espace."
La tentative de vol. Deux ou trois jeunes seraient entrés sur un chantier privé, un autre faisant le guet. Pour l'IGS, la "tentative de vol était bien constituée dans la mesure où ses auteurs n'avaient renoncé à leur action concertée et organisée, non pas de leur propre fait, mais suite à l'intervention rapide et efficace des policiers de la BAC 833".
Les policiers ont-ils vérifié la présence des jeunes dans la centrale EDF ? A 17 h 32, le gardien de la paix Stéphane G. passe trois messages radio dans la même minute : "Deux individus sont localisés. Ils sont en train d'enjamber pour aller sur le site EDF. Il faudrait cerner le coin." Puis : "Il faudrait ramener du monde", et enfin : "S'ils rentrent sur le site EDF, je ne donne pas cher de leur peau". Devant le juge Géron, le 13 novembre, il a déclaré "qu'à aucun moment, il n'a[vait] vu de jeunes rentrer sur le site EDF".
Pour l'IGS, ces messages "paraissent
bien avoir été suivis d'effets, car aussitôt après qu'ils furent émis,
plusieurs fonctionnaires se sont mis en devoir de s'approcher de la
centrale". Stéphane G. se serait hissé à deux reprises sur une
poubelle, puis une armoire électrique, pour observer l'intérieur de la
centrale. "N'ayant rien vu, a expliqué Stéphane G. au magistrat, j'ai pensé qu'il n'y avait personne." "Au final, conclut l'IGS, les recherches des policiers ne permettaient pas de localiser les jeunes."
L'inaction des policiers. Sur les dix-sept policiers impliqués dans l'intervention, le 27 octobre, seuls six d'entre eux ont indiqué avoir entendu les messages signalant l'introduction des jeunes sur le site EDF. Pour l'IGS, "il paraît singulier qu'en phase active de recherche de délinquants, les fonctionnaires impliqués n'aient pas prêté attention aux messages radio (…), près des deux tiers d'entre eux ont failli dans ce domaine".
Et l'IGS de conclure : "L'étude de la chronologie des faits met en évidence le fait que si EDF avait été avisée au moment où le gardien de la paix G. constatait que les deux jeunes étaient susceptibles d'entrer dans la centrale, les agents EDF seraient intervenus un quart d'heure avant que ne se produise l'accident, (…) l'urgence aurait voulu que fussent appelés les services d'EDF". Néanmoins, selon les enquêteurs, "l'intervention des agents EDF n'aurait pas, à coup sûr, évité l'accident".
Les jeunes avaient-ils été cernés ? Pour l'IGS, "plus qu'un encerclement de la centrale, et bien que le verbe 'cerner' eût été prononcé sur les ondes, les opérations menées par les policiers s'apparentaient davantage à une intensification des recherches autour de la centrale, une manœuvre imparfaite, en tout cas non orchestrée, menée de manière empirique et dans un très court trait de temps". Cinq véhicules avaient participé à l'opération.
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