La fiducie, un joli cadeau du gouvernement au Medef
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la loi française "progresse" et s'aligne sur la mondialisation financière. L'alignement par le bas continue.La fiducie, un joli cadeau du gouvernement au Medef
http://www.liberation.fr/actualite/economie/233265.FR.php?rss=trueLes entreprises l'attendaient depuis 1789. «L'introduction de la fiducie dans notre droit est attendue depuis la rédaction du code civil», écrit ainsi Xavier de Roux, le député UMP rapporteur du texte qui doit être discuté demain à l'Assemblée. Les auteurs de la proposition de loi prévoyant l'instauration de la fiducie, un nouveau droit de propriété adapté aux entreprises, n'ont pas peur de faire dans l'emphase. Pourtant, le débat autour de cette «révolution juridique» ne devrait pas excéder une demi-heure. En catimini, on va ainsi greffer dans le droit français un système assimilable au trust anglo-saxon, ou à l' anstalt chère aux banques du Liechtenstein et pilier des paradis fiscaux les plus opaques.
L'introduction de la fiducie en France est une vieille
revendication des professions libérales et des entreprises.
«C'est un moyen pour améliorer notre attractivité, justifie
Xavier de Roux.
C'est un instrument de lutte contre les délocalisations.
Aujourd'hui, certaines entreprises sont obligées d'aller créer des
trusts en Angleterre ou au Luxembourg pour profiter de la souplesse
de ce système.» A l'appui, le député UMP, ancien avocat
d'affaires, avance le cas d'Alstom, qui avait dû créer un trust
anglo-saxon dans le cadre de sa restructuration, ou de la Française
des Jeux, société publique, qui, pour lancer Euro Millions avec
d'autres sociétés européennes, avait utilisé un trust au
Royaume-Uni.
Succession. Car la fiducie, qui permet de découpler
la propriété d'un bien de son propriétaire (lire ci-contre),
procure une souplesse juridique sans équivalent : elle permet par
exemple de loger les dettes d'un groupe dans une filiale distincte,
de créer une structure qui gère l'épargne salariale, ou de mettre
de côté des fonds en vue de la dépollution de sites industriels.
Pour les particuliers, la fiducie est utilisée pour transmettre ses
biens à ses enfants sans avoir à payer des droits de
succession.
Autant d'arguments qui trouvent relais au Sénat en la personne
du très libéral Philippe Marini. En février 2005, le sénateur UMP
rédige une proposition de loi d'application très générale
instaurant la fiducie à la française. Son texte traîne pendant des
mois, puis le gouvernement le fait adopter par le Sénat en octobre
dernier. Avec modifications inspirées par le ministère des
Finances, qui protège ses ressources fiscales. Les particuliers
sont exclus du dispositif, et ce dernier ne permet pas de faire des
économies d'impôt. Obligation est également faite de se déclarer à
l'administration fiscale.
«Ordre du jour». A ce stade, personne à droite ne
semble montrer un grand enthousiasme à porter la proposition à
l'Assemblée. Le texte paraît devoir finir, comme de nombreux
autres, au cimetière parlementaire. D'autant que le calendrier est
très chargé. Mais, il y a une semaine, surprise, une
«fenêtre politique extraordinaire» s'ouvre, note un
observateur. Le gouvernement vient de renoncer à défendre son
projet de loi sur la consommation, qui instaurait les «class
actions» à la française à cause, officiellement, du trop grand
nombre d'amendements déposés. Immédiatement, la droite comble le
vide.
«Les députés UMP sont arrivés en commission des lois avec en
main le texte sur la fiducie et ont changé brutalement l'ordre du
jour, raconte un membre de l'Assemblée.
Nous n'avons à peine eu le temps de travailler le texte. Leur
seule exigence, c'était qu'il passe au plus vite.» A gauche, on
fait le rapprochement :
«Le Medef ne voulait pas des actions de groupe, le projet est
retiré, note perfidement Arnaud Montebourg le député PS de
Saône-et-Loire.
Il réclame la création des fiducies depuis quinze ans, on leur
trouve une niche parlementaire. Le patronat fait vraiment l'ordre
du jour de l'Assemblée.»
La droite se défend mollement :
«Ce remplacement est une pure coïncidence, dit Xavier de
Roux.
On substitue un texte qui ne tenait pas debout [le projet de
loi sur la consommation, ndlr]
par un texte dont j'entends parler depuis mes débuts comme
avocat, il y a quarante-trois ans.» Malencontreux hasard, le
même député se trouvait être le rapporteur du texte
consommation...
«Offshore». Le Medef n'a cependant pas tout gagné.
Dans une note confidentielle, l'organisation patronale déplore que
«les limitations de l'usage de la fiducie privent l'institution
d'une grande part de son intérêt». Mais à plus long terme, comme
le reconnaît Xavier de Roux, le texte
a
minima a
v
o cation à être complété. Dans un sens plus libéral, avec des
fiducies de plus en plus opaques. Ce que dénonce Montebourg, qui
prédit
«une France qui ressemblera à la Grande-Bretagne».
«Toutes les économies offshores se sont bâties sur des outils
comme les trusts ou l' anstalt
, fait remarquer le député PS.
Ce texte est le cheval de Troie du capitalisme financier le plus
dérégulé.» Le plus difficile est toujours de faire le premier
pas. Ce devrait être chose faite mercredi.
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