le rapport explosif sur la France, enterré sous Sarkozy place Beauvau
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ceux qui nous gouvernent ont peur ou aiment se faire peur, ils n'ont pas confiance dans le pays - vision des technocrates qui ne sont pas arrivé à faire le bien à cause du peuple qui ne comprend decidement rien à rien. C'est le reflet d'une partie de la classe dirigeante qui se croit supérieure et plus intelligente - ce n'est pas "notre faute, c'est celle du peuple".Certains scenarios catastrophes reflettent un niveau de conviction que le pays est au bord du gouffre, Si c'est le cas, l'occident dans son ensemble (sauf exception nord europe et allemagne) est au bord du gouffre et il manque un scenario de guerre mondial si c'est vrai.
Pourquoi pas après tout si on veut vraiment se faire peur.
Les Nicolas Baverez et autres declinologues ont reussi à convaincre une partie de nos dirigeants qui semblent vraiment manquer de capacité de reflexion propre
le rapport explosif sur la France, enterré sous Sarkozy place Beauvau
Le Président de la République doit discourir, le 4 avril, sur la modernisation de l’Etat. Un chantier déjà bien mal engagé. Quand il était ministre de l’intérieur, Nicolas Sarkozy avait mis au placard un rapport prospectif très alarmiste sur l’avenir de la France et des administrations Avec scénarios catastrophes à l’appui… « Bakchich » s’est procuré ce document et vous en livre des extraits. Ce n’est pas triste
« Quand il est urgent, c’est déjà trop tard ». Cette phrase de Talleyrand figure en introduction d’un rapport confidentiel de prospective sur la France et les missions du ministère de l’intérieur, en date du 28 mars 2006. Un rapport épais, de 560 pages, qui établit des scénarios alarmistes sur la société française (Mai 1968, en version noire), qui brosse un bilan cruel du rôle de l’Etat et en appelle à sa modernisation rapide.
Ce document, couvé par un certain Daniel Canepa, pilier du ministère de l’Intérieur, proche de Claude Guéant, le bras droit de Nicolas Sarkozy, a été élaboré par les consultants du groupe Futuribles pour le ministère, quand Sarkozy était en poste place Beauvau [1]. Hasard ? Il a été achevé au moment des grandes manifestations contre le Contrat Première Embauche, qui ont dû faire reculer le gouvernement de Villepin, ce qui a pu influencer un peu ses auteurs. Depuis, il a été enterré… Cachez ces scénarios noirs que nous ne saurions voir. En mars 2006, vu la situation tendue, il était, visiblement, « urgent » d’attendre… Le rapport s’est ensuite empoussiéré dans des placards. Mais Bakchich s’en est, récemment, procuré une copie et en révèle, ci-dessous, des extraits particulièrement instructifs.
Une réforme de l’Etat déjà plombée
Alors que le Président de la République doit, vendredi 4 avril au matin, prononcer un discours jugé important sur la « modernisation des politiques publiques » et la « réforme de l’Etat », la lecture de ce rapport, mis au placard depuis deux ans, mérite le détour. D’autant que, selon nos informations, la « réforme de l’Etat » annoncée depuis des lustres, serpent de mer politique, a des allures de Titanic. Le chantier de la « revue générale des politiques publiques », vaste kärcherisation de toutes les dépenses de l’Etat initiée par l’Elysée, est en train de tourner au vinaigre.
En coulisses, les ministères s’étripent sur les budgets qui risquent d’être gelés, voire annulés, pour cause de rigueur ou de sauve-qui-peut. La confusion règne sur l’avenir budgétaire du « plan banlieue » (signé Fadela Amara), du « revenu de solidarité active » (défendu par Martin Hirsch) ou du « Grenelle de l’environnement » (cher à Jean-Louis Borloo). La marmite scolaire bout, pour cause de réductions d’effectifs, tandis que le ministère de la Défense, qui doit envoyer 1 000 soldats de plus en Afghanistan, va être contraint de jongler avec ses cagnottes avant de faire une croix sur certains programmes d’armement.
Des lettres aux préfets qui se téléscopent
Pis : la zizanie règne même au ministère de l’Intérieur et des collectivités territoriales, le cœur du pouvoir régalien, piloté par Michèle Alliot-Marie (MAM). Le Premier ministre, François Fillon, a envoyé, le 19 mars, une longue lettre à tous les préfets, qu’il doit réunir prochainement, expliquant leur feuille de route dans le malström de la décentralisation. Un plan d’action jugé assez obscur, où les régions doivent se renforcer, les départements se développer… et les préfets, derniers représentants d’un Etat en miettes, jouer un rôle « déterminant » dans la concertation de tout le monde !
Prenant sa plus belle plume, Daniel Canepa, passé de la place Beauvau à la préfecture de région Nord-Pas-de-Calais, a aussi écrit, mi-mars, en tant que président de l’association du corps préfectoral, à tous les préfets pour dire le mal qu’il pensait des réformes en cours, engagées, selon lui, « en dépit du bon sens ». Et le sieur Canepa, qui a toujours l’oreille de Guéant, de tirer à boulets rouges sur le ministère. Du côté de MAM, les oreilles ont sifflé. Et les préfets, ballottés et déshabillés de nombreux pouvoirs, ne savent plus qui écouter, ni par où commencer !
Pendant ce temps, la France s’enfonce dans la crise économique et sociale et l’Etat part toujours en quenouilles… « Quand il est urgent, c’est déjà trop tard » disait Talleyrand…
A vous de juger, maintenant, du contenu de ce rapport détonant, qui pronostiquait quelques explosions…
Les scénarios à l’horizon 2010-2020 : si la France allait dans le mur !
1-Le premier scénario est titré « Une France incertaine dans un monde tumultueux »
Il s’agit de la simple extrapolation des tendances passées. Rien de très farce, en vérité : un « état récessif et graduel », de « déclin progressif que rien ne paraît de nature à enrayer », avec une économie « atone », un chômage « endémique », des institutions publiques réduites à « l’impuissance »…
Le rapport précise : « la multiplication des niveaux d’administration publique et le double processus de décentralisation et de déconcentration, l’un et l’autre largement inachevés, forment un maquis dans lequel les acteurs ont embourbés et qui entraîne une désaffection des citoyens vis-à-vis de la chose publique. » Bref, le tableau actuel est sombre, et l’avenir peu réjouissant, dans un climat général « d’incertitude » et de « demande croissante de sécurité à laquelle s’efforce prioritairement de répondre la puissance publique en appelant en permanence au dévouement et à la compétence de ses agents- qui courent au plus pressé ». De quoi vous mettre le blues pour la journée.
2-Le deuxième scénario, plus noir, traite de « l’implosion de la société française dans un monde tumultueux ».
Le contexte international est alors marqué par la dégradation de la situation, une Union européenne réduite à une zone de libre-échange, des délocalisations industrielles massives. Le chômage s’accroît, tout comme les inégalités sur le marché du travail et le poids des dépenses de retraites et de dépendance des personnes âgées.
Résultat : « La privatisation de nombreux services publics et le repli de l’Etat dans une fonction de maintien de l’ordre et d’ajustement au jour le jour, malgré une aggravation de la situation, permettent de résister péniblement à des explosions majeures ». Les experts travaillant pour le ministère de l’intérieur sont décidément très euphoriques !
3-Le troisième scénario va encore plus loin dans la cata. Il est titré « Décomposition de la France dans un monde traumatisé ».
Accrochez vos ceintures pour la descente aux enfers. A l’extérieur, ce scénario cumule les catastrophes écologiques, l’aggravation du terrorisme, le repli des Etats-Unis sur « fortress America », des troubles en Asie et au Moyen-Orient, l’expansionnisme russe, l’ébullition méditerranéenne et des conflits européens « générés par l’éventuelle adhésion de la Turquie ».
A tous ces malheurs, s’ajoutent, au plan domestique, des heurts entre générations et des révoltes sociales. « Des explosions majeures interviennent dans les banlieues mais aussi parmi les étudiants et sont relayées par une grande partie des classes moyennes qui voient leur situation se dégrader. » Le spectre d’une crise majeurs, type mai 1968, mais en bien pire !
Les effets sont désastreux : « les personnes les mieux nanties n’ont qu’une idée : partir à l’étranger. Se développe une économie souterraine qui échappe à tout contrôle. Le mécontentement général de la population se traduit par un climat de défiance généralisée, par une évasion fiscale sans précédent. »
De plus, les auteurs de ce scénario ne voient pas ce que l’Etat peut faire : « Les pouvoirs publics, manifestement surpris par l’ampleur des événements, n’ayant pas eux-mêmes réussi à moderniser leur administration et à accroître l’efficacité de leurs services, se trouvent cernés de toute part par les urgences et incapables d’y faire face ».
Du coup, une bombe politique se profile, avec la menace d’un régime autoritaire : « plusieurs gouvernement successifs ayant ainsi été obligés de démissionner car ils étaient totalement discrédités, tant en raison de leur discours décalé que de leur inefficacité sur le terrain, une crise politique majeure s’instaure, favorisant quelques partis extrêmistes qui, la démagogie étant devenue inopérante, prêchent pour le rétablissement d’un ordre public par voie autoritaire ». N’en jetez plus !
La place Beauvau, sous Sarko, n’écartait donc aucun cauchemar. La conclusion se voulait rassurante : « Cette évolution à moyen et à long terme, bien qu’elle soit tout à fait possible, n’est en rien inéluctable ». « Possible » quand même ! Mais, ouf, après s’être faits peur, les experts passaient aux deux autres scénarios, forcément plus roses, ceux-là.
4-Le quatrième scénario est baptisé « Refondation française dans un monde en "coo-pétition" ».
Sarkozystes dans le ton, les auteurs parlent, là, de « plusieurs ruptures importantes » par rapport à la situation actuelle. Un climat de coopération-compétition (baptisé coo-pétition) s’installe entre les grands blocs économiques, Etats-Unis, Europe, Chine, etc. L’Union européenne s’élargit à 30 membres et un noyau dur de 5 à 7 pays (dont la France et l’Allemagne) « forme une Europe de type fédérale qui se propose de mettre en oeuvre une politique d’inspiration sociale démocrate en s’inspirant du modèle scandinave ».
A l’intérieur « les réformes qui s’imposaient en France mais qu’aucun gouvernement n’avait réussi à mettre en œuvre en raison des rigidités inhérentes à la société française, peuvent enfin être appliquées, de sorte que s’instaure un système d’inspiration de type « flex-sécurité » marqué par une beaucoup plus grande mobilité sur le marché du travail ».
Dès lors, emportés dans leur élan, les auteurs foncent, sabre au clair, vers un monde enchanteur : « Ainsi, les baronnies de toute sorte (grands et petits corporatismes, féodalités locales, groupes de pression divers) propres à la société française, y compris les problèmes des grands corps au sein de l’appareil d’Etat, sont-elle abolies au profit d’un système dans lequel l’accès à l’emploi est beaucoup plus aisé, les périodes de chômage beaucoup plus courtes, la mobilité professionnelle et/ou géographique nettement améliorée ».
Et ce Nirvana n’est pas fini : « simultanément, est engagée une réforme fiscale de grande ampleur permettant tout à la fois de remédier au déficit public et/ou à l’opacité d’un système qui finissait par nuire à sa légitimité ». Au passage, pan sur l’opaque blockhaus de Bercy !
Cependant, il y a des contreparties : « Un nouveau contrat social est ainsi instauré aux alentours des années 2010 marqué par une très grande simplification des dispositifs de protection sociale, y compris l’introduction, par exemple, de clauses empêchant aux allocataires (Rmistes, chômeurs…) de s’installer dans un système d’assistance sociale nuisible aussi bien au plan social qu’économique et financier. » Par ailleurs, une « réforme de grande ampleur s’accompagne d’une redéfinition claire des missions imparties à l’Etat qui, ce faisant, devient à la fois plus modeste, plus moderne et davantage stratège ».
Evidemment - rappelons que ce rapport date de mars 2006, plus d’un an avant les présidentielles - les auteurs l’affirment : « un tel scénario ne saurait apparaître qu’à une condition : qu’une volonté politique claire et forte, tant au plan européen qu’au plan intérieur, s’affirme et reconnaisse l’utilité d’une Europe fédérale et d’un niveau inférieur d’administration publique, celui des régions »(…) « Cela implique manifestement une rupture fondamentale par rapport au scénario tendanciel actuel, y compris en raison de la remise en cause des statuts et de la reconnaissance des fonctions et des compétences sur le seul critère des objectifs poursuivis par la fonction publique ». Une vraie rupture.
On croirait que Sarko y a puisé quelques discours de campagne…
5-Le cinquième scénario, original, est titré « fragmentation et négociations généralisées »
Il ausculte une autre piste. Le précédent scénario étant incertain, puisque l’initiative doit venir « d’en haut », celui-là est basé, dans un climat international de même nature, sur une « floraison d’initiatives venant "de la France d’en bas", initiatives au plan économique, social et citoyen qui, dans un contexte de vacance presque totale du pouvoir central, se déploient sur le terrain, font apparaître l’utilité de rétablir des liens qui amènent, de bas en haut, une action vigoureuse de coordination et d’orchestration de ces actions dispersées ».
On croirait presque écouter du Ségolène (mais sans Ségolène au pouvoir !).
Dans cette hypothèse, la France bouge grâce aux élus locaux qui entament une « rénovation radicale de la société française » : les communes se regroupent, 6 à 10 grandes régions se constituent, aux côtés d’un « Etat modeste » recentré sur ces missions régaliennes et de coordination.
Pour les experts du ministère de l’Intérieur, qui se situent alors en 2020, ce scénario du futur pourrait émerger ainsi :« A l’issue des troubles importants que la société française a connus au cours des années 2006-2012 durant une période où les pouvoirs publics s’étant avérés manifestement incapables de contrôler les événements, ce sont cette fois les représentants de la société civile et les élus en premier lieu qui explorent ensemble les fondements d’une nouvelle constitution marquée par une réhabilitation du pouvoir parlementaire et la redéfinition du pouvoir exécutif, sur des bases assurément plus modestes mais autrement mieux définies ».
Etonnante fiction qui pronostique, alors que Sarko est en poste place Beauvau, des troubles à venir durant plus d’un quinquennat ! Sur un ton très « Ah, ça ira, ça ira ! », le rapport évoque, pour les dépasser, la tenue de « nouveaux états généraux » et d’un « Congrès de Versailles » dont les leitmotiv sont « la transparence et l’efficacité ». Des réformes en surgissent : réforme fiscale, élargissement de la CSG à l’ensemble des revenus, etc. On se pince !
Conclusion ? Le jeu est ouvert, mais les deux derniers scénarios sont « peu vraisembables »
Sur lequel de ces 5 scénarios, dont aucun n’échappe à des conflits, des crises et des ruptures, les experts du ministère de l’Intérieur pariaient-ils secrètement début 2006 ?
« Aucun de ces cinq scénarios ne prétend raconter à l’avance et de manière parfaitement homogène ce que sera l’avenir du contexte international, de l’économie et de la société française » écrivent les auteurs du rapport qui, prudents, estiment alors que l’avenir est « très largement ouvert ».
Néanmoins, il semble certain, à leurs yeux, « que le scénario tendanciel tel qu’il est, constitue une menace réelle » et que « des alternatives existent » en fonction des réactions de la société et du « rôle plus ou moins énergique que peut jouer l’Etat dans la prise de conscience des enjeux auxquels le pays est confronté et, a fortiori, dans l’introduction de politiques dont l’inspiration peut être très différente ». Autrement dit : selon les élections…
Mais, dans ces dernières pages, le rapport n’est pas particulièrement optimiste : les cinq à dix années à venir seront marquées, selon les auteurs, par « une instabilité croissante, la multiplication des facteurs de tensions et des conflits de toute nature » comme le révèlent les trois premiers scénarios. Pas très encourageant ! Quant aux deux derniers scénarios, qui « supposent une refondation du pacte républicain par le haut ou par le bas », ils « apparaissent peu vraisemblables à court et moyen terme, compte tenu des inerties régnantes et de l’impossibilité de changer la société par décret ». Pas sympa pour Sarko, ce passage (page 555) !
Le ministère de l’intérieur peut disparaître
Quant au ministère régalien de l’Intérieur, objet initial de l’étude prospective, il n’est guère mieux loti. Il est déjà confronté actuellement aux cloisonnements administratifs, à l’inflation législative, aux forces centrifuges et au « processus inachevé de décentralisation ». Les auteurs estiment (page 554) dans ce contexte, qu’en cas d’immobilisme, il est « sans doute condamné à la dislocation ». Les premières mesures de modernisation et de restructuration de l’administration centrale ne pourront s’avérer « efficaces que si elle s’inscrivent dans une démarche, à moyen et long terme, de réformes permettant réellement de redonner au ministère de l’Intérieur le prestige et la légitimité qui furent les siennes ».
Bon courage et bonne journée quand même !
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