Le Yuan pourrait-t-il contester la suprématie du dollar ?
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Cet article rédigé par un ancien conseiller de Bill Clinton decrit un virage geopolitique majeur qui se ferait à l'occasion de cette crise.au moment du G20, les medias ont oublié d'insister sur de la demande de la chine de trouver une alternative au dollar. Depuis, la chine a prêté des Yuan à l'argentine, propose de payer du pétrole en Yuan ...
La chine sera la 2eme puissance mondiale devant le japon d'ici 1 ou 2 ans, elle est le premier créditeur mondial, et donc en position de modifier l'equilibre mondial. C'est le virage historique de la premiere moitié du 21eme siècle.
Le Yuan pourrait-t-il contester la suprématie du dollar ?
http://contreinfo.info/article.php3?id_article=2737Les empires commencent à décliner lorsque leur situation financière se dégrade. Largement endettés, les USA doivent s’attendre à terme à voir contester le statut du dollar. Quelle serait alors la devise de référence ? Roubini ne croit pas que la monnaie européenne soit à même de jouer ce rôle, en raison des incertitudes sur la cohésion de la zone euro. Resterait alors le yuan, qui pourrait selon lui supplanter le dollar d’ici à une dizaine d’année.
par Nouriel Roubini, New York Times, 14 mai 2009
Le 19ème siècle a été dominé par l’Empire britannique, le 20ème siècle par les États-Unis. Nous pourrions maintenant entrer dans un siècle asiatique, dominé par la Chine et sa devise. Bien que le statut du dollar comme principale monnaie de réserve de ne disparaîtra pas du jour au lendemain, nous ne pouvons plus le considérer pour acquis. Plus tôt que nous ne le pensons, le dollar pourrait être contesté par d’autres monnaies, et plus probablement par le yuan chinois. Cela entraînerait des coûts importants pour l’Amérique, car notre capacité à financer à bon compte nos déficits du budget et du commerce disparaîtrait.
Traditionnellement, les empires qui détiennent les réserves de devises mondiales sont aussi des créanciers et des prêteurs nets vis-à-vis de l’étranger. L’Empire britannique a décliné - et la livre a perdu son statut de principale monnaie de réserve mondiale - lorsque la Grande-Bretagne est devenue un débiteur net et un emprunteur net durant la Seconde Guerre mondiale. Les États-Unis sont aujourd’hui dans une situation similaire. Ils accumulent d’énormes déficits commerciaux et budgétaires, et comptent sur la bienveillance continuelle de créanciers étrangers qui commencent à se sentir mal à l’aise à l’idée d’accumuler toujours plus d’actifs libellés en dollars. La chute du dollar pourrait n’être qu’une question de temps.
Quelle devise pourrait le remplacer ? La livre sterling, le yen japonais et le franc suisse restent des monnaies de réserve mineures, ces pays n’étant pas de grandes puissances. L’or est toujours une relique barbare dont la valeur n’augmente que lorsque l’inflation est élevée. L’euro est pénalisé par les préoccupations relatives à la viabilité à long terme de l’Union monétaire européenne. Reste le yuan.
La Chine est un pays créancier ayant un compte courant largement excédentaire, un déficit budgétaire modeste, une dette publique en proportion du PIB beaucoup plus faible que celle des États-Unis, et une croissance solide. Elle a déjà pris des mesures en vue de contester la suprématie du dollar. Pékin a appelé à la création d’une nouvelle monnaie de réserve internationale, sous la forme de Droits de Tirage Spéciaux du Fonds Monétaire International (basés sur un panier de dollars, d’euros, en livres et en yens). La Chine voudra bientôt que sa propre monnaie soit incluse dans ce panier, et que le yuan soit utilisé comme un moyen de paiement dans les échanges commerciaux bilatéraux.
Cependant à l’heure actuelle le yuan est loin d’être prêt à acquérir le statut de devise de réserve. La Chine devrait d’abord à assouplir les restrictions sur les entrées et sorties d’argent, rendre sa monnaie entièrement convertible pour de telles transactions, poursuivre ses réformes intérieures et rendre ses marchés d’obligations plus liquides. Il faudra beaucoup de temps pour que le yuan devienne une monnaie de réserve, mais cela pourrait se produire. La Chine a déjà révélé ses intentions en mettant en place des échanges de devises avec plusieurs pays (dont l’Argentine, le Bélarus et l’Indonésie) et en laissant les institutions de Hong Kong émettre des obligations libellées en yuan, première étape vers la création d’un grand marché national et international de sa devise.
Si la Chine et d’autres pays voulaient diversifier leurs avoirs de réserves hors du dollar - et ils finiront par le faire - les États-Unis en souffriront. Nous avons tiré des avantages financiers du statut de monnaie de réserve du dollar. En particulier, la vigueur du marché du dollar permet aux Américains d’emprunter à de meilleurs taux. Nous avons ainsi été en mesure de financer d’importants déficits à faible coût, car la demande étrangère a maintenu des taux bas pour les bons du Trésor. Nous avons également été en mesure d’émettre des emprunts dans notre propre monnaie et non pas en devise étrangère, transférant ainsi les pertes résultant d’une baisse de la valeur du dollar sur nos créanciers. Le fait que les matières premières soient cotées en dollars signifie aussi que la baisse du cours du dollar ne se traduit pas par une hausse du prix des importations.
Imaginez maintenant un monde où la Chine pourrait emprunter et prêter à l’étranger dans sa propre monnaie. Le yuan, au lieu du dollar, pourrait éventuellement devenir un moyen de paiement pour le commerce international, une unité de compte pour la tarification des importations et des exportations, ainsi qu’une réserve de valeur patrimoniale pour les investisseurs internationaux. Les Américains auraient à en payer le prix. Nous devrions alors débourser davantage pour les marchandises importées, et les taux d’intérêt augmenteraient, à la fois pour le privé et sur la dette publique. La hausse du coût du crédit pour le privé pourrait se traduire par une consommation plus faible, des investissements moindres, et un ralentissement de la croissance.
Cette baisse du dollar pourrait prendre plus d’une décennie, mais elle pourrait intervenir plus tôt encore si nous ne remettons pas de l’ordre dans nos finances. Les États-Unis doivent maîtriser leurs dépenses et leurs emprunts, et rechercher une croissance qui ne soit pas basée sur des bulles d’actifs et de crédit. Durant les deux dernières décennies, l’Amérique a dépensé plus que son revenu, augmentant son passif et accumulant les dettes à des niveaux devenus insoutenables. Le système monétaire mondial où le dollar est la principale devise nous a permis de continuer à emprunter de façon imprudente.
Maintenant que la position du dollar n’est plus aussi assurée, nous devons changer nos priorités. Cela nécessitera d’investir dans notre infrastructure qui est en ruine, dans les énergies alternatives et renouvelables et le capital humain productif - plutôt que dans des logements inutiles et des inventions financières toxiques. Ce sera la seule façon de ralentir la baisse du dollar, et de maintenir notre influence dans les affaires du monde.
Nouriel Roubini est professeur d’économie à la New York University Stern School of Business et dirige un cabinet de conseil économique.
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