Revue de presse - Savoie

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Quand les Etats-Unis réinventent la sécurité sociale

COMMENTAIRES

Le modèle ultra-libéral aux USA est un désastre:
- 16% de la population sans assurance santé, et baisse de la couverture de la population en general
- système qui coute 2 fois le système français, donc bien moins efficace
- hyper profit des sociétés de santé (30% qu'on veut ramener à 15% !!!)
- on peut ajouter espérance de vie la moins bonne de tous les pays développés

Quand on compare les prélèvements obligatoires et que Sarko dit qu'ils sont trop élevés, peut-etre faut-il preciser qu'on peut les baisser comme au USA et arriver au meme niveau de santé publique.

Illustration: une visite chez un pédiatre "normal" à Berkeley (Californie) coutait 151$ à l'automne 2006

Chaque fois que la part de marché des grandes sociétés à but lucratif augmente en France, comme par exemple la générale de santé, on se rapproche doucement de ce modèle.

Quand les Etats-Unis réinventent la sécurité sociale

http://www.lesechos.fr/journal20070125/lec1_idees/4528502.htm

En présentant son programme de protection santé universelle, au début du mois, Arnold Schwarzenegger a déclaré tout fort ce que de plus en plus de commentateurs évoquent discrètement depuis plusieurs mois : la solution au système de santé américain ne peut émerger qu'en rupture avec les positions partisanes qui verrouillent le débat et les velléités de réforme depuis des décennies.

Le gouverneur républicain de Californie est un adversaire fervent de toute hausse des impôts et, pourtant, il a évoqué une « contribution » des hôpitaux et des médecins. Les législateurs républicains n'ont pas été dupes du jeu sémantique, affirmant qu'ils ne soutiendraient jamais ce nouvel impôt. Le « Governator » veut imposer aux assureurs de réinvestir 85 % de leur chiffre d'affaires dans leurs services - autrement dit, plafonner leurs frais administratifs et marketing, et leurs profits, à 15 % (contre 30 % en moyenne actuellement). Il veut leur interdire aussi de refuser ou de tarifer leurs services sur la base de discrimination d'âge ou d'état de santé des individus.

Or ce n'est pas son président qui lui donnera tort : George W. Bush a affirmé mardi dans son discours sur l'état de l'Union sa volonté de consacrer des fonds fédéraux supplémentaires aux initiatives des Etats soucieux d'étendre une protection santé à tous. L'idée lui avait été soufflée la semaine précédente par un aréopage d'élus des deux partis.

En fait, Arnold Schwarzenegger s'est largement inspiré des idées avancées au mois de décembre par le président de l'Assemblée de Californie, Fabian Núñez, et le sénateur Don Perata. Les deux élus démocrates ont chacun présenté un plan en rupture avec le modèle de « payeur unique » (entendez l'Etat) traditionnellement défendu par leur parti, et typiquement battu en brèche par les républicains, opposés à une « médecine socialisée ». Le plan en question repose simplement sur le principe des « responsabilités partagées », où l'employeur, l'Etat, l'assureur privé, le médecin, l'hôpital et l'individu sont tous mis en demeure d'assumer une partie de la responsabilité financière et opérationnelle du système.

Démocrates et républicains, employeurs et employés, médecins et groupes de consommateurs s'accordent tous pour l'instant sur un point : la santé aux Etats-Unis est une tragédie humaine et financière, et négliger de réformer le système en profondeur met en péril l'avenir du pays.

Actuellement, plus de 46 millions d'Américains n'ont aucune couverture santé, soit environ 16 % de la population. En fait, ce sont 41 % des individus qui se sont retrouvés dépourvus d'assurance à un moment donné sur l'année 2005, contre 28 % en 2001. La part des salariés couverts par leur employeur a chuté de 81 % à 77 % entre 2001 et 2005. Simultanément, une police d'assurance pour une famille de quatre personnes coûte en moyenne plus de 10.000 dollars par an, soit l'équivalent du salaire minimum brut défini par la loi fédérale. Selon l'Institute of Medecine, près de 20.000 personnes non assurées meurent prématurément chaque année, faute d'avoir reçu les soins élémentaires adaptés.

Ironie du système, la santé aux Etats-Unis coûte deux fois plus cher qu'en France, à plus de 5.500 dollars par personne en 2005. Plus de 55 % des faillites personnelles sont causées par des dettes de frais de santé, or dans les trois quarts des cas les personnes concernées ont une assurance-santé.

Pour la première fois depuis son arrivée à la tête de la Réserve fédérale, le 1er février dernier, Ben Bernanke n'a pas mâché ses mots, la semaine dernière, lorsqu'il a déclaré que si la tendance actuelle se maintenait, le coût de la santé aux Etats-Unis (16 % du PNB, en augmentation annuelle de 14 %), exacerbé encore par le vieillissement des baby-boomers, contribuerait à pousser le déficit budgétaire jusqu'à 100 % du PNB d'ici à 2030 - un niveau atteint une seule fois durant la Seconde Guerre mondiale.

Pourtant les éléments de réponse sont connus, retournés dans tous les sens, à maintes reprises et en pure perte, par les gouvernements successifs. Hillary Clinton est la dernière à s'être livrée à l'exercice, en 1994, durant son séjour à la Maison-Blanche en tant que première dame. Avec un tel fiasco médiatique, public et politique que le débat fédéral a été prudemment consigné jusqu'à maintenant.

Une fois de plus, sur les sujets de poids, il semble que l'initiative doive partir des Etats. Au printemps dernier, le Massachusetts a adopté, avec le soutien appuyé de son gouverneur républicain, le premier plan de protection santé universelle du pays : obligation faite aux individus de souscrire une assurance et aux employeurs d'investir dans la protection santé de leurs employés ; élargissement des subventions publiques à la protection santé des défavorisés ; et contrôle par l'Etat du marché des assurances au nom de l'intérêt du consommateur. Le gouverneur Mitt Romney, fidèle à ses racines d'homme d'affaires, a simplement déclaré à l'époque que c'était une question de bon sens économique : le coût des soins onéreux attribués aux non-assurés par les services des urgences des hôpitaux, à qui la loi fédérale interdit de renvoyer quiconque, est couvert par le denier public. Autrement dit, une forme d'impôt indirect plus élevé que les frais de santé correspondant aux besoins réels de ces patients.

Certes, le Massachusetts compte tout juste 6,4 millions d'habitants, dont à peine 500.000 (7,8 %) ne sont pas assurés. (La Californie, par contraste, compte plus de 6,5 millions de non-assurés, soit 18 % de sa population.) Il n'empêche, le petit Etat du Nord-Est a le mérite d'avoir ouvert la voie. Le gouverneur républicain du Vermont, un Etat plus petit encore, a voté depuis une loi de « couverture presque universelle », destinée à améliorer le sort de ses 25.000 non-assurés. Et le débat va bon train dans le Wisconsin, l'Illinois, le Colorado, le Nouveau-Mexique, l'Oregon et l'Etat de Washington. Avec un espoir non dissimulé à Washington : que les meilleures idées viennent un jour faire leur nid dans la capitale.

LAETITIA MAILHES est correspondante des « Echos » à San Francisco



25/01/2007
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