Revue de presse - Savoie

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Total est au coeur de la rivalité franco-américaine

COMMENTAIRES

La lutte contre la corruption est au mieux un rideau de fumée sans effet réel dans les pays où elle règne et au pire une arme de lutte sans merci pour gagner des marchés sans scrupule aucun.
Tony Blair a le mérite de le dire ouvertement: British Aerospace a vendu des avions en corrompant les intermédiaires, c'est la règle, on n'enquête pas.

Les USA ont une stratégie pour respecter les règles officiellement et paraitre blanc comme neige et les contourner en utilisant Israel qui n'a pas signé les conventions anti corruption, ou en délocalisant leurs firmes comme Halliburton à Dubai. Dick Cheney connait bien la musique puisqu'il dirigeait Halliburton.

Le monde économique de l'armement, de l'energie est un nid de vipères où tous les coups sont permis; soit on est prêt à jouer ce jeu, soit on sort du jeu. Il ne faut se faire aucune illusion sur la blancheur affichée par les différentes parties.

Total est au coeur de la rivalité franco-américaine

http://www.lemonde.fr/web/article/0,1-0@2-3234,36-890671@51-885881,0.html

La justice suit son cours et Christophe de Margerie son calendrier. Malgré sa mise en examen, le 22 mars, pour "corruption d'agents publics étrangers" et "abus de biens sociaux" dans le cadre d'un contrat gazier signé avec l'Iran en 1997, le directeur général de Total a inauguré, jeudi 29 mars, le gigantesque gisement de Dalia, en Angola, qui assurera au groupe 9 % de sa production. Business as usual ?


INVESTISSEMENTS

DANS LE MONDE.

Total a investi 11,8 milliards d'euros dans le monde en 2006.

EN IRAN.

Total envisage d'investir plus de 2 milliards de dollars (1,5 milliard d'euros) dans le projet gazier de South Pars dans le golfe Persique. La compagnie nationale iranienne aurait 50 %, Total 40 % et le malaisien Petronas 10 %. Le coût du projet est d'environ 8 milliards d'euros.

Total doit affronter deux menaces : les foudres de la justice française, qui applique la convention anticorruption de l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), ce qui vaut aujourd'hui deux mises en examen à M. de Margerie ; le risque de rétorsion des Américains, qui stigmatisent les mauvaises fréquentations de Total - hier avec l'Irak de Saddam Hussein, aujourd'hui avec l'Iran des mollahs.

Début mars, le président démocrate de la commission des affaires étrangères de la Chambre des représentants a annoncé le dépôt de propositions de loi accroissant les sanctions. La numéro deux de cette commission veut aussi obliger les fonds de pension fédéraux à céder les actions des compagnies pétrolières investissant plus de 20 millions de dollars (15 millions d'euros) en Iran dans les hydrocarbures, un secteur vital pour le régime qui y puise l'essentiel de ses ressources.

Cette campagne touche aussi l'anglo-néerlandais Shell, le russe Gazprom ou le malaisien Petronas, mais les deux mises en examen de M. de Margerie ont relancé les attaques américaines.

Dans un rapport intitulé Stratégies de désinformation des médias américains à l'égard des entreprises européennes, la délégation aux affaires stratégiques (DAS) du ministère de la défense recense les attaques avant et après le veto de Paris à la guerre en Irak et décrit les liens entre l'administration Bush, les think tanks néo ou ultra-conservateurs et les médias américains.

Le document note que les groupes français restent dans le collimateur, même si le French bashing ("casser du Français") est moins hystérique qu'en 2003 et 2004. "La création au Pentagone, en mars 2006, d'un "Iranian Directorate" constitue une claire menace pour les entreprises françaises ou européennes ayant des projets/activités avec l'Iran, comme Technip/Cryostar, Total ou BNP Paribas", prévient le rapport.

Le parapétrolier français Technip et Cryostar, dont le siège social est en France, ont déjà été la cible d'attaques de l'administration et des médias américains en 2003-2004. Il leur était reproché la vente de pompes cryogéniques risquant de contribuer à un programme d'armement nucléaire iranien.

Ces groupes ont peut-être "joué avec le feu", avance le rapport, mais les accusations s'inscrivaient dans une campagne visant à citer des firmes françaises dans un dossier sur la prolifération nucléaire. Les médias avaient laissé entendre que des camions Renault Trucks servaient de laboratoires mobiles pour des armes biologiques.

L'Amérique cherche aussi à tailler des croupières aux concurrents en Chine, où tout investissement étranger "fera l'objet de l'attention particulière de l'administration américaine" (défense, aérospatial, télécommunication, énergie) et en Inde. La DAS estime que Washington a un avantage dans le sous-continent indien : l'alliance stratégique sécurité-défense scellée par l'Inde, les Etats-Unis et Israël. "Or dans un pays où la corruption est quasi institutionnalisée, le partenariat avec les Israéliens pourrait s'avérer particulièrement intéressant pour les entreprises américaines, rappelle le rapport : Israël n'est pas signataire de la convention OCDE."

Aux yeux de politiques et d'éditorialistes américains, Total a toujours été d'une complaisance coupable à l'égard de régimes autoritaires ou dictatoriaux (Venezuela, Iran, Irak...). Ils l'accusent d'avoir passé des contrats avec le régime de Saddam Hussein pour préparer l'après-embargo sur l'Irak. Si les liens n'ont jamais été rompus avec le régime irakien, le groupe affirme n'avoir jamais signé de contrat contournant le régime de sanctions de l'ONU.

Les majors américaines sont-elles devenues des parangons de vertu ? Pourtant, elles ont aussi préparé l'après-Saddam. Ainsi la très conservatrice Heritage Foundation avait étudié un partage de l'exploitation de l'or noir entre trois consortiums - suivant le partage ethnico-religieux chiites, sunnites et kurdes -, chacun étant dirigé par une compagnie américaine. ExxonMobil et Chevron financent cette fondation.

Des sociétés américaines ont aussi contourné l'embargo contre l'Iran, y investissant via des filiales offshore ou bénéficiant de licences à l'export du département du Trésor. En 2004, le parapétrolier Halliburton, présidé jusqu'en 2000 par le vice-président Dick Cheney, signait un accord pour aider l'Iran à exploiter son gaz... après avoir annoncé - sous la pression de fonds de pension - son retrait du pays. Des analystes estiment que cette coopération de longue date aurait permis à Téhéran de progresser dans son programme nucléaire. Des firmes américaines (General Electric, Dresser Rand...) font des affaires avec des " Etats voyous" (Iran, Soudan...). Selon le Bureau américain des statistiques, le montant des exportations vers ces rogue states a atteint 1,15 milliard de dollars en 2006.

Jean-Michel Bezat



02/04/2007
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