GDF-Suez - La lettre de griefs de Bruxelles
COMMENTAIRES
Pour résumer, les règles européennes signées en novembre 2001 par le
gouvernement français, font que l'eventuel groupe Suez - GDF a de forte
chance d'être démantélé.
La situation actuelle est que les engagements pris en leur nom avec
l'Europe, peuvent être contradictoires avec les souhaits des français.
- tout ou partie de la politique de libéralisation de l'Europe est-elle reversible si un peuple souhaite revenir en arrière ?
- si non, est-il "normal" que la volonté populaire ne puisse aller que dans un sens (vers le libéralisme) et jamais dans l'autre ?
- est-ce que les politiques de la commission sont en phase avec les souhaits des français (ou des autres peuples)
- quel niveau de pouvoir voulons-nous garder en France en ce qui concerne les services publics d'energie et de transport - que voulons nous faire faire au niveau européen en acceptant que la france pèsera alors 15% du choix.
- est-il encore temps ou trop tard pour poser cette question ?
GDF-Suez, ce que le gouvernement vous cache
Énergie. La lettre de griefs de Bruxelles suggère le démantèlement du système gazier français. Dominique de Villepin et Nicolas Sarkozy veulent camoufler ce projet à l’opinion publique.
LL’Humanité a pris connaissance de la lettre de griefs que la Commission européenne a adressée aux dirigeants de Gaz de France et de Suez dans la perspective de la fusion des deux groupes. Le document de 200 pages, dans sa version non expurgée et non censurée, est composé de quatre parties relatives au marché du gaz en Belgique, au marché du gaz en France, au marché de l’électricité en Belgique et aux réseaux de chaleur en France. Dans chacune de ces parties, la commission analyse l’impact de la fusion sur le marché et répertorie les « barrières » à la mise en oeuvre de la concurrence libre et non faussée. Il donne à ce titre de sérieuses indications sur les restructurations que Bruxelles pourrait imposer au cas où le gouvernement français déciderait de conduire le projet de fusion à son terme. Les extraits que nous choisissons de publier concernent uniquement la filière gazière nationale et les trois piliers sur lesquels elle est organisée : les contrats à long terme, le caractère intégré du groupe GDF et les prix réglementés. Ses extraits ne laissent aucune ambiguïté sur la volonté de la Commission européenne de remettre en cause le système gazier français.
Les contrats à long terme
« 429. Certes, GDF et Suez ne sont pas les seuls opérateurs gaziers ayant conclu des contrats d’achat de gaz à long terme. En particulier les autres opérateurs historiques européens ont également accès à de tels contrats. En revanche, les autres opérateurs qui ambitionnent d’entrer sur les marchés du gaz ont plus difficilement accès à ces contrats. Ainsi, dans un tel contexte, la détention de contrats à long terme confère un réel avantage à la nouvelle entité par rapport aux opérateurs qui ne viennent d’entrer que récemment (tels EDF, Poweo ou Altegaz) ou qui ambitionnent de le faire. »
*La Commission européenne a les contrats à long terme dans le collimateur. Leur durée oscille généralement entre vingt et trente ans et offre un avantage considérable à l’entreprise détentrice. Le prix du gaz négocié dans leur cadre est inférieur de moitié à celui du marché. En cas de fusion, pour mettre à égalité GDF-Suez et ses concurrents, la Commission européenne exigera que soit mis un terme à ce genre de contrat. L’ensemble des opérateurs gaziers européens devront alors se fournir au prix du marché. Et le consommateur en fera les frais...
Le caractère intégré
de GDF :
« 483. GDF, à l’instar d’autres opérateurs historiques gaziers européens, est un groupe verticalement intégré où coexistent à la fois des activités de fourniture de gaz et des activités d’exploitation d’infrastructures gazières. Ainsi, à côté de ses activités de fournisseurs (GDF Négoce), GDF comprend trois gestionnaires d’infrastructures : GRT Gaz (transport), DGI (stockage et terminaux méthaniers) et Gaz de France Réseau Distribution (GRD Distribution). »
« 484. L’existence de tels groupes verticalement intégrés pose en soi un conflit d’intérêt structurel dès lors que les marchés et la fourniture du gaz sont libéralisés et que les fournisseurs de gaz autres que l’opérateur historique sont obligés d’utiliser les
infrastructures gazières de celui-ci. »
*La commission constate que les concurrents de GDF pour importer, transporter, et distribuer leur gaz en France seront contraints d’utiliser les infrastructures de l’entreprise nationale. Autrement dit, ils dépendront de GDF pour commercialiser leur gaz. Pour mettre fin à cet avantage, en cas de fusion avec Suez, Bruxelles exigera que l’opérateur gazier cède toute ou partie de ses infrastructures.
Les prix réglementés :
« 502. [...], la commission considère que les prix réglementés en vigueur se caractérisent par un niveau inférieur au prix du marché et qu’ils empêchent de ce fait l’entrée des concurrents sur le marché ».
*On ne peut plus clair. Pourquoi le consommateur opterait pour les prix du marché et pour la concurrence quand les prix réglementés pratiqués par GDF leur sont inférieurs ? Pour permettre à la concurrence de gagner des parts de marché et en cas de fusion avec Suez, la commission exigera que soit mis un terme aux prix réglementés. Et tant pis si, une fois encore, le consommateur en fait les frais.
Conclusion :
Les griefs formulés par la Commission européenne en disent long sur les réels objectifs poursuivis par les partisans d’une fusion GDF-Suez. Si jamais, ce processus aboutit, Bruxelles se saisira de l’occasion pour imposer le démantèlement d’un système qui en soixante ans d’existence a fait ses preuves tant en sécurité d’approvisionnement qu’en matière de prix. Un système plus efficace que le marché mais qui aux yeux de Bruxelles a le défaut de violer le sacro-saint principe de « concurrence libre et non faussée » qui préside à la construction européenne. À la lecture de ces griefs, on comprend également mieux le black-out dont les entourent le gouvernement, GDF et Suez. En effet, les extraits que nous publions démontrent que la fusion ne donnera pas naissance au géant gazier promis et n’aura pas les vertus que ses partisans lui prêtent. Les cessions d’infrastructures que Bruxelles imposera, pourraient même aboutir à ce que la nouvelle entité soit plus petite que le groupe GDF actuel. Quant à l’évolution à venir des prix du gaz, la remise en cause des contrats à long terme et des prix réglementés démontrent que la fusion provoquera bel et bien une nouvelle flambée. Plus qu’un géant gazier, la fusion GDF-Suez vise en fait à construire un concurrent à EDF. Le PDG de l’électricien national, Pierre Gadonneix, s’y prépare. Il s’est récemment déclaré intéressé par le rachat des cessions que Bruxelles imposera à GDF.
Pierre-Henri Lab
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