"L'Inde est sur orbite pour conquérir le monde"
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Il y a environ 10 ans de retard entre l'Inde et la Chine dans son développement économique - mais le même potentiel pour que ces 2 pays reprennent leur juste place dans la monde - c'est à dire les premières.La vision des économistes libéraux "haut de gamme et innovation en occident" et "bas de gamme et fabrication" en Asie est stupide et méprisante. C'est pourtant celle qui se cache derrière l'expression "pays émergeants" - sous-entendant la competition par les coûts mais jamais par la compétence.
Si on regarde la réalité en face, c'est à dire l'arrivée de 2 géants - chacun égal voir supérieur en compétence et en potentiel à tout le continent Européen (ils sont chacun 2 fois plus nombrux que l'union européenne) - alors on changera peut-être dans nos relations - moins condescendante, plus réaliste et aussi moins naïve quand on ouvre un marché et on abandonne des pans entiers d'industrie.
"L'Inde est sur orbite pour conquérir le monde"
http://www.lexpansion.com/art/4496.155410.0.htmlDes groupes indiens multiplient les offensives sur les entreprises européennes. Carrefour est directement visé tandis qu'Areva se voit concurrencé dans son offensive sur RePower. Michel Testard, spécialiste de l'Inde des affaires, analyse la montée en puissance des groupes indiens.
Autre "victime" de cet activisme indien : Areva. Le leader français du nucléaire, qui cherche à se diversifier dans les énergies nouvelles, a été contraint jeudi de relever considérablement son offre sur le fabricant d'éoliennes allemand REpower Systems, la portant de 105 euros par action à 140 euros. Et ce sous la pression du fabricant indien de turbines Suzlon Energy qui avait lancé une contre-offre à 126 euros. A supposer que celui-ci abandonne la lutte, Areva devra donc verser près d'1,4 milliard d'euros au lieu de 850 millions initialement. Une hausse de facture qui a d'ailleurs été dure à faire accepter par Bercy. Quoi qu'il advienne, ces deux initiatives sont révélatrices de la nouvelle puissance des entreprises indiennes, prêtes à conquérir les marchés mondiaux. C'est ce qu'explique Michel Testard, consultant international en management et auteur de "L'appel de l'Inde" (Editions Pearson Education France).
- Que révèlent ces deux offensives de groupes indiens ?
C'est une succession d'assauts qui remonte plus loin. Le premier coup de tonnerre a eu lieu lorsque Mittal a lancé son OPA sur Arcelor, même si l'entreprise n'était pas vraiment indienne. Plus récemment, il y a eu Tata Steel, qui a racheté l'anglo-néerlandais Corus, suivi d'autres actions dans la pharmacie. Venant d'Inde, on n'a pas à attendre d'exportations massives de produits ou de services. Les exportations indiennes s'élèvent à 150 milliards de dollars, c'est un septième des exportations chinoises. En revanche, de nombreuses entreprises indiennes sont en train de se mondialiser. Elles peuvent le faire parce qu'au cours des 15 dernières années, elles se sont modernisées et elles ont réduit leurs coûts, et parce qu'elles ont développé dans leur pays des modèles économiques très différents des nôtres, basés sur un immense marché et des prix faibles. Alors que chez nous, on vend à moins de monde mais plus cher. Ce sont donc des entreprises "low cost", très agiles, dirigées par des familles, ce qui les rend très mobiles. C'est souvent un fils qui est aux commandes, avec sa famille aux différents postes de direction. Il décide donc souverainement, ce qui explique que ces entreprises vont très très vite et qu'on ne les voit pas venir.
- Elles sont donc très différentes de nos entreprises occidentales ?
Oui, pour l'instant. Ce sont des petites boites qui montent extrêmement vite, avec des croissances de 30 à 40%. On les considérait comme émergentes et bas de gamme. Ce qui a fait dire à Guy Dollé que son groupe produisait du « parfum » en comparaison de « l'eau de Cologne » de Mittal, lors du raid de Lakshmi Mittal. Mais résultat, c'est l'eau de cologne qui a racheté le parfum! Qu'on ne s'y trompe pas, les groupes indiens remontent très vite en gamme. Et ils profitent de trois atouts fondamentaux: ils sont dirigés par des patrons indépendants et très rapides; ils sont assis sur beaucoup de cash; et ils bénéficient d'une diaspora dans le monde de plus de 20 millions de personnes, qui leur relaient l'information.
- Jusqu'où pourrait s'étendre cette expansion ?
Pour l'instant, il s'agit d'acquisitions de taille moyenne. Mais une entreprise indienne pourrait acheter Capgemini ou Atos sans problème. On pensait au début que cela ne touchait que l'informatique avec la pratique de l'offshore, qui s'est développée dans la région de Bangalore. Mais on voit que ça touche aussi la pharmacie, l'acier, les télécoms. On va le voir un peu partout. Les industriels indiens n'ont aucun complexe. Il y a trois ans, le slogan dans le pays était « Shining India » (l'Inde qui brille), aujourd'hui c'est « India poised » : l'Inde est sur orbite pour conquérir le monde. Ils ont un modèle indien qui marche bien chez eux, à la différence des entreprises étrangères en Inde, qui peinent à percer dans le pays. C'est un modèle low cost, et c'est sur la base de ce modèle qu'ils s'internationalisent. C'est vrai qu'il y a des réglementations qui mettent des barrières pour les groupes étrangers. C'est notamment le cas pour la grande distribution, ce qui gène Carrefour ou Wal-Mart dans leur volonté de pénétrer le marché indien, et qui oblige Carrefour à s'associer avec un groupe indien s'il veut entrer dans le pays. Mais ces barrières finiront par tomber et les Indiens font actuellement une course contre la montre pour prendre d'ici là des parts de marché.
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